La Ronde des Mineurs 2018 : Hommage et émotion
Dans un silence de cathédrale, le nom d’Arnaud Beltrame résonne sur l’esplanade du Puits de mine Hely d’Oissel. A fleur de peau, l’émotion est palpable. Le visage du Lieutenant-colonel de Gendarmerie est dans tous les esprits. Sur la ligne de départ, aucun rire ne fuse. Uniquement des visages graves. Puis, des applaudissements à tout rompre s’élèvent du peloton. Sans fin. Coureurs et spectateurs rendent un hommage interminable au héros qui, quelques heures plus tôt, s’est sacrifié pour sauver ses concitoyens. Le speaker, Kamel Amiri, tente de reprendre la parole mais, submergé par l’émotion, ne finit pas sa phrase. Un silence, puis, des sanglots dans la voix, il parvient enfin à balbutier : « on se sent tout petit face au courage d’un mec comme lui ! ».
Je me souviendrai longtemps du départ de cette 10° édition de la Ronde des Mineurs. Des moments forts, j’en ai vécu en 25 ans de course à pied, mais aucun ne m’avait pris les tripes autant que le bouleversant hommage rendu par l’organisation et le peloton, ce dimanche 25 mars, à Gréasque. Arrivé sur place la veille, j’avais pu prendre le temps de découvrir le musée de la mine en retirant mon dossard. Wagonnets, puits de mine, architecture industrielle, rien ne manquait à l’appel pour la mise en ambiance.
Passage à l’heure d’été oblige, c’est donc dossard déjà en poche et avec une heure de sommeil en moins que j’arrivais sur Gréasque. Cette course m’avait tenté par sa thématique industrielle, mais aussi parce que j’étais curieux de découvrir comment l’organisation pouvait proposer un parcours « nature » dans un environnement de bassin minier. En outre, le parcours traversait le village, promettant ainsi ambiance, animation et encouragements.
Les rues proches du départ étaient déjà noires de coureurs quand j’arrivais sur place. J’enfilais rapidement mon maillot du club par dessus un T-shirt manches longues, le temps frais mais sec me faisant privilégier davantage de confort qu’un simple débardeur. Short, gants fins et manchons de compression complétaient mon équipement. Sur l’aire de départ, je retrouvais avec plaisir cette ambiance bon enfant que nous apprécions tous : accolades, discussions impromptues, selfies… Le speaker annonça l’imminence d’un échauffement collectif. Il était temps pour moi de gambader un peu.
Ma mise en jambes achevée, je rejoignais l’aire de départ, où une prof de fitness achevait de coacher concurrents et concurrentes pour les étirements. Bientôt, on forma une haie d’honneur pour accompagner le départ d’une joëlette de Dunes d’Espoir, et Kamel appela les coureurs du parcours de 15km. Un peloton dense se rassembla rapidement pour écouter les derniers conseils du directeur de course. Puis, on éteignit la sono et le speaker commanda le silence. Instantanément, une chape de plomb nous tomba sur les épaules, comme si chacun attendait ce moment, comme si chacun réclamait de rendre cet hommage et prendre sa part de deuil. Un instant de communion cruellement indispensable. Mes respects, Mon Colonel.
A 10h, on donna le départ du parcours de 15km. Je prendrais le départ 10mn après, avec les concurrents de la boucle de 7km. J’ignorais tout de l’itinéraire, ayant simplement repéré sur internet que notre parcours n’empruntait qu’une portion de la plus grande boucle, et s’achevait au centre du village. Je rejoignais bientôt mes camarades de course, et le départ fut donné sans retard. Un premier kilomètre très rapide, tout en descente, nous fit traverser le village, où passants et enfants nous encourageaient de vive voix.
Un virage à gauche, et le macadam céda la place à un chemin de terre. Sous un sous-bois, le chemin devint piste forestière, et un premier croisement nous sépara du parcours de 15km. La piste s’allongea alors en une ascension régulière. Le rythme était élevé, et je commençais à me dire que je ne parviendrais pas à tenir cette allure si la montée devait durer. Je réduisis la longueur de mes foulées, tractant sur mes bras pour accompagner mon ascension. La température était finalement idéale, permettant d’éviter toute surchauffe. Heureusement, de part et d’autre de la piste, la forêt méditerranéenne nous aurait offert une ombre salvatrice si le soleil avait été de la partie.
Plus haut, notre parcours déboucha sur un faux plat montant, où nous rejoignîmes les coureurs du 15km. Je profitais alors de ce répit pour avaler une dose de gel et une gorgée d’eau au premier ravito. Par chance, une longue descente nous attendait juste après. J’en profitais pour allonger ma foulée, profitant de l’excellent amorti des Hoka Speedgoat 2 pour dérouler entre les cailloux.
Plus bas, un virage en épingle à cheveux à droite nous sépara des coureurs du 15km. Notre descente se poursuivait vers le village de Gréasque puis, après un virage à gauche, je retrouvais des paysages rencontrés à l’aller : le sous-bois traversé quand nous avions quitté le macadam. Damenède ! Cela signifiait donc que, pour rejoindre l’arrivée toute proche, nous allions devoir regrimper la longue descente que j’avais tant appréciée au départ ! Je puisais donc dans mes dernières forces pour parcourir les dernières centaines de mètres et, bientôt, sprintait sur la longue ligne droite de l’arrivée.
Soupe, bière artisanale, groupe de musique, sac finisher rempli de goodies, ravito final gargantuesque, bénévoles aux petits soins : rien ne manquait une fois l’arche passée.
Au final, entre émotions et performances sportives, je garde un excellent souvenir de cette matinée et ne peux que vous encourager à venir à Gréasque découvrir cette très belle épreuve. Un grand merci aux organisateurs et bénévoles pour leur dévouement, et à Kamel pour son discours. Enfin, oui, un grand merci à « tous les mecs en uniforme, policiers, municipaux, nationaux, gendarmes, pompiers », sans qui rien n’est possible. A l’an prochain, sans hésitation !